PIRATERIE SOMALIE : Malgré les pirates, deux plaisanciers bordelais refusent de renoncer à une croisière dans le golfe d’Aden
Par Jean Guisnel
Alors que les moyens du Quai d’Orsay sont mobilisés pour assurer le retour vers la métropole des Français bloqués à l’étranger par l’interruption des vols, la cellule de crise se débat parallèlement avec une affaire curieuse. Elle se déroule à Djibouti, où l’équipage d’un petit navire de plaisance de 10,65 m et de 40 ans d’âge, le ketch Anaika, immatriculé à Bordeaux, cause un casse-tête à la diplomatie française.
Selon nos informations, Olivier G. et Sandrine G. ont l’intention de quitter Djibouti incessamment, avec leur petit navire dont la vitesse plafonne à 6 noeuds, avec un franc-bord d’un mètre, et une radio portant à 25 km.
D’abord en longeant la côte somalienne, ils entendent se rendre aux Seychelles via les Maldives, en passant par le golfe d’Aden et l’océan Indien, constituant une proie évidente pour les pirates qui sont actuellement en période d’activité maximale. Ces joyeux inconscients, dont la barcasse est censée héberger une association loi 1901 déclarée au Journal officiel , veulent notamment "favoriser, entretenir et développer les contacts entre des personnes passionnées par les bateaux de plaisance, à voile ou à moteur".
Dans cette affaire, évoquée le 13 avril par le site spécialisé Mer & Marine , les diplomates de même que les militaires anticipent le gros pépin et ne veulent pas risquer les vies de sauveteurs, ni payer une rançon, pour sauver ces éventuels otages. Ils ont fait savoir à l’équipage de la manière la plus ferme qu’ils désapprouvent leur façon de faire. "On a essayé par tous les moyens de leur faire entendre raison, mais sans succès", s’indigne un diplomate, qui relève que deux hauts fonctionnaires les ont reçus à l’ambassade de Djibouti en pure perte. Du coup, le Quai d’Orsay leur a envoyé une lettre officielle. Mais elle n’a suscité en retour qu’une réponse en forme de bras d’honneur, signée par le skipper Olivier G.. Le Point a pu prendre connaissance de ce document édifiant : "Je ne minimise pas le danger de passer par le golfe d’Aden. Je sais que je vous cause beaucoup de problèmes, mais nous ne ferons pas demi-tour. Le voilier Anaika , Olivier G., Sandrine G. et le chat Ulysse continueront leur voyage dans l’océan Indien. Je ne retiens que le mot liberté des trois mots qui étaient inscrits sur nos pièces de monnaie, et peut-être fraternité , si vous nous souhaitez bon voyage."
Ulcérés, marins et diplomates ne savent plus quels arguments faire valoir, dès lors que Djibouti est un territoire étranger, où ils n’ont aucun moyen juridique d’agir. Mais le droit de la navigation étant ce qu’il est, rien n’interdit à nos deux farfelus d’aller se jeter dans la gueule du loup !