OTAGES FRANçAIS NIGER : La guerre de l’uranium
Par pierre-alain , le 24/06/2008
Quatre ressortissants français travaillant au Niger pour Areva ont été enlevés, dimanche 22 juin, par des rebelles touaregs du Mouvement des Nigériens pour la justice, en conflit ouvert avec le régime de Niamey. Les otages devraient être libérés sans négociation, "avec un message" pour le groupe nucléaire, qui prévoit d’augmenter sa production d’uranium dans la région.
Quatre cadres français du groupe Areva - un directeur d’exploitation, deux collaborateurs et une géologue - ont été enlevés dans la région d’Arlit, dans le nord du Niger. Lieu où la société nucléaire française exploite des mines d’uranium.
Les ravisseurs seraient des membres du Mouvement des Nigériens pour la Justice (MNJ), connu pour sa lutte pour une meilleure répartition des richesses naturelles du pays, parmi lesquelles on compte l’uranium et le pétrole.
Dans un communiqué diffusé sur son site Internet, le MNJ souligne que cette opération commando n’a pour seul objectif que de "ramener à la réalité" les partenaires miniers du Niger, qui selon lui semblent plus "écouter les illusions et fantasmes du gouvernement, qui dit pouvoir leur assurer la garantie de travailler dans cette situation de conflit (...) au lieu, de prendre à la juste valeur la gravité de la situation".
Le MNJ affirme par ailleurs que les otages ne courent aucun danger et qu’ils seront remis prochainement à la Croix-Rouge et ainsi permettre leur retour dans leurs familles.
Présent depuis quarante ans dans ce pays africain, le groupe nucléaire y est en butte à des escarmouches depuis au moins un an. Suspecté d’être de mèche avec la rébellion par les autorités, le directeur général d’Areva-Niger, Dominique Pin, a définitivement été expulsé par le Niger le 24 juillet 2007. Et il avait fallu la mi-janvier 2008 pour qu’un partenariat sur l’exploitation et l’achat de l’uranium soit scellé entre les deux parties, mettant ainsi un terme à près de huit mois de crise, engendrée par le présumé soutien du numéro un mondial du nucléaire civil à la rébellion touarègue.
Le groupe français avait alors obtenu, malgré les concurrences chinoise, australienne et indienne, la concession pour deux années supplémentaires de l’exploitation de deux mines d’uranium, ainsi que l’autorisation d’en ouvrir une troisième contre l’augmentation de 50 % du tarif alloué à l’Etat nigérien du précieux minerai.
A l’heure où la perspective de reprise des programmes nucléaires dans le monde fait flamber les cours de l’uranium, cet accord s’avère essentiel pour le numéro un du nucléaire français. Quatrième producteur mondial d’uranium, le Niger représente la deuxième source d’approvisionnement d’Areva, qui en tire 40 % à 45 % de ses tonnages suivant les années, juste derrière le Canada, soit 30 % des besoins en combustible des centrales nucléaires de la France.