OTAGES COLOMBIE : HERVIN HOYOS menacé de mort
Herbin Hoyos, le journaliste qui a créé "Las Voces del Secuestro, et qui a interviewé récemment des colombiens repris sur une liste pour être extradés aux Etats-Unis pour trafic de drogues, a annoncé qu’il devait quitter le pays suite à un ultimatum de 72 heures.
Herbin Hoyos, fondateur de "Las Voces del Secuestro qui retransmet depuis plusieurs années les messages des familles de personnes kidnappées en Colombie, est aussi le directeur du programme "Amanecer en América", de Radio Caracol. Pour cette émission, comme il l’a fait à d’autres occasions, il a été à la prison Cómbita, dans le département de Boyacá, près de Bogota, et y a interviewé plusieurs personnes condamnées pour trafic de drogues.
"M. Hoyos, nous sommes surpris de ce que vous avez fait aujourd’hui en visitant la Prison de Cómbita... ... aussi il est prudent qui vous vous rendiez compte que vous avez mis le doigt dans une problématique qui n’est pas de votre compétence et que par conséquent nous vous suggérons de quitter le pays le plus rapidement possible, sinon ceci pourrait avoir des répercussions sans précédents pour vos enfants et votre famille. Nous savons que vous avez fait ces interviews avec beaucoup d’argent des media, mais il y a encore plus de dollars pour les faire taire. C’est un avertissement. Cela ne sert à rien de défendre des délinquants qui ont fait du mal à la Colombie. Celui qui fréquente des perdants est lui-même déjà un perdant, et ces gens, à cause de ce qu’ils ont fait, sont des perdants. Vous avez 72 heures pour sortir du pays."
C’est là une partie du message reçu via internet par Herbin Hoyos, et qui est signé par "Le Front d’Action pour le Justice, pour la Liberté et pour la Démocratie".
"Je ne fais pas l’apologie de l’infraction. Comme journaliste et comme investigateur dans de nombreux cas liés aux Droits Humains, je suis conscient que même le pire délinquant a le droit minimal à faire connaître sa vérité individuelle ", s’est défendu Hoyos.
Les délinquants en voie d’être extradés avaient déclaré dans leurs interview avec Hoyos que leurs demandes d’extradition avaient été montées par les agences de renseignement de l’État (la Dijín et la DAS) et par des informateurs de la DEA (organisme antidrogues des Etats-Unis).
Parmi eux il y a un vendeur de bananes de Barranquilla, un indigène du Cauca et un vendeur de téléphones du centre de Bogota qui expliquent la misère dans laquelle ils vivent. Toutefois, selon leurs témoignages, "pour la DEA ils sont de hauts dirigeants du trafic de drogue ou des collaborateurs d’Al-Qaeda".
Au cours du programme de samedi dernier, il y a eu plusieurs réactions, et parmi elles, la question de savoir si le journaliste avait ouvert le microphone à des délinquants, ce à quoi Hoyos a répondu :
Hoyos a gagné en 2000 le prix Simón Bolivar du Journalisme dans la domaine de la meilleure couverture de l’actualité, pour son travail "La Tchétchénie, l’horreur dans le Caucase, reportage de guerre". Cette même année il avait a été arrêté et tabassé par des miliciens paramilitaires tchètchènes loyaux à Moscou.
"Ils m’ont jetée au sol, ils m’ont tabassé, ils ont tiré en l’air et je pensais qu’ils allaient me tuer", a-t-il alors rapporté. Selon le jury, ce reportage s’est transformé en l’entreprises la plus risquée qu’ait menée la radio colombienne de tous les temps.
Herbin Hoyos, correspondant de guerre de Radio Caracol, a déjà couvert trois conflits armé : après le Golfe Persique et l’Iraq, après la Bosnie Herzegovine et le Kosovo, il a risqué une fois de plus sa vie en Tchètchènie ou il a utilisé le téléphone satelitte pour informer ses auditeurs pendant 17 jours, dès le début de la guerre, au milieu des bombardements.
Un rapport récent de la Fondation pour la Liberté de Presse (FLIP) a indiqué que "les violations de la liberté de presse en Colombie ont augmenté au premier semestre 2006, suite aux menaces des paramilitaires d’extrême droite démobilisés qui visent les journalistes dans différentes régions du pays".
La FLIP a indiqué qu’entre janvier et juin de cette année on avait enregistré 72 violations à la liberté de presse dans le pays, en comparaison avec 48 au premier semestre 2005.
Il a ajouté que "dans la période analysée on a enregistré des obstacles et des traitements dégradants contre des journalistes, tandis que quatre journalistes ont dû s’exiler, un a été kidnappé et un autre assassiné".
Selon les chiffres de la Société Interaméricaine de Presse (SIP), de Journalistes sans Frontière et de la FLIP elle-même, plus de 100 journalistes ont été assassinés depuis 1980 - ces crimes sont attribués aux narco-trafiquants, aux paramilitaires et à la guérilla.
La FLIP a souligné, toutefois, que "la situation s’est considérablement améliorée durant les dernières années, bien qu’actuellement les groupes armés illégaux et les narco-trafiquants utilisent plus les menaces et l’intimidation de journalistes qu’e les attaques directes".